13. LA FABULEUSE HISTOIRE DE DAGENHAM & REDBRIDGE


S’il avait correctement résisté aux turbulences des Coupes du Monde au Qatar et aux Etats-Unis, les diverses affaires de corruptions en Afrique eurent temporairement le dessus sur la carrière de l’italo-valaisan Gianni Infantino. Il faut dire que les enjeux de l’organisation du football mondial avaient passablement évolué et que les sociétés commerciales cherchaient désormais un peu plus de place au-devant de la scène. Difficiles pour l’image écornée de la FIFA d’offrir toute la crédibilité nécessaire et de continuer à brasser les milliards de crédits-dollars du nouvel opium des peuples.

La société de gestion de la Coupe du monde fut partiellement cédée à un consortium marketing qui alloua à Coca-Cola Limited Company des droits publicitaires, d’image et de gouvernance sur l’ensemble de l’organisation. En parallèle de cela, Steeven Ribéry fut élu comme 3e président français de tous les temps à la présidence de la FIFA, après un intérim assuré par Sun Jihai.

Durant son année sabbatique de repos sur une île déserte du Pacifique, le juriste et ex-Président du football mondial avait pu faire le point sur ses ambitions et ses intérêts et en avait assez étonnamment conclu que la gestion du football resterait une motivation première, d’autant que ses contacts et son expérience pouvaient encore largement influer. Pour cela, il fallait encore purger une deuxième année de suspension et régler les trois dernières traites de remboursements de l’amende que le tribunal international des affaires du sport de haute compétition de Shanghai lui avait infligée.

Depuis quelques semaines, Christoffer, le plus jeune fils du célèbre entraîneur suédois Sven-Göran Eriksson désormais disparu, était devenu un conseiller de plus en plus proche ; ça sentait le business avec Christoffer, même si l’esprit posé du suédois était quelque peu différent de celui de Gianni, le latin.

C’est ainsi que de fil en aiguille, Gianni Infantino devint progressivement le repreneur du club de 5e division britannique de Dagenham & Redbridge Football Club, basé à Londres. Et pourtant dans ce club de 3e zone (sportive), on sentait bien le football local, la passion des suiveurs, et l’esprit d’appartenance des jeunes. Une aubaine pour Gianni qui flairait le potentiel d’un club qui n’avait jamais vraiment brillé plus haut que la 4e division anglaise, et qui par miracle avec la fusion d’avec les championnats gallois et écossais avait pu se maintenir au 5e niveau national.

Infantino se mit à la recherche d’un entraîneur de grande classe, mais il n’était finalement pas si facile de convaincre quand on avait été mouillé à ce point dans les scandales. C’est finalement par le biais de son ami Christoffer qu’un coach prometteur viendrait épauler les nouvelles ambitions de Dag & Red : Mickey Stevenborg. Le jeune entraîneur de 36 ans du RFC Union Luxembourg, double champion du Grand-Duché, était accessoirement auteur d’un parcours remarquable en Coupe d’Europe ces derniers mois, jusqu’en 8e de Finale de la Coupe des Coupes enfin restaurée.

Sous une apparence froide et sereine, Stevenborg était bien plus sensible qu’il ne le lassait paraître. Il s’était fait connaître quelques semaines plus tôt en révélant qu’il avait l’habitude de rêver de ses matchs la veille, et, parce qu’il s’avérait que ça ne se passait pas toujours bien durant le sommeil, il corrigeait alors ses dispositifs tactiques et ses consignes. Apparemment, selon ses dires, ça avait porté ses fruits à maintes reprises.

Les arméniens de Gandzasar, les Georgiens de Tbilissi, et, exploit, les russes de Kaliningrad-Königsberg avaient été écartés par le fier club semi-professionnel luxembourgeois et son entraîneur, suite à un de ses rêves fallait-il croire, avant qu’ils ne s’inclinent que sur un double match nul malheureux contre le Rosenborg Ball Klub de Trondheim. Autant dire que Dag & Red faisait une sacrée affaire. Mais pour éclairer un peu plus le contexte de cette arrivée, il faut également noter que le Championnat du Bénélux qui était en train de se monter pour la première fois la saison suivante, était de mauvais augure pour les clubs luxembourgeois. La perspective d’évoluer dans le championnat britannique ou les crédit-dollars coulaient à nouveau à flot était meilleure, même en 5e division…

Bref, Mickey Stevenborg et son adjoint Bodo Merzig, germano-luxembourgeois originaire de Wiltz au Nord du Grand-Duché, formeraient encore une fois le duo gagnant, cette fois en proche banlieue londonienne. A défaut de pouvoir établir des liens de partenariat avec son ancien club, c’est avec la Jeunesse d’Esch-sur-Alzette, le seul club luxembourgeois de 1ère division du Benelux, que Stevenborg mis en place une affiliation directe avec Dag & Red. C’est ainsi qu’Armin Tedewski arriva, en plus de Jan-Horst Merzig le fils de Bodo et de deux jeunes de 19 ans, dont un certain Vesper Hope. C’est donc a priori sans renfort particulier dans le contingent du club, mais en structurant le staff technique, que Mickey et Bodo parvinrent immédiatement à décrocher le titre à ce niveau.

Pour la deuxième saison, Mickey s’était donné comme objectif de façonner l’équipe à sa tactique préférentielle, offensive mais solide derrière, largement tournée vers les ailes lors des possessions de balle. Trois arrières latéraux et trois ailiers arrivèrent tout d’un coup. Et même la défense centrale était modifiée, pour épauler le capitaine jamaïcain Jessy Brown-Dwight de l’équipe. En attaque, c’est Ian Verpakovskis, fils d’un joueur professionnel letton et d’une chanteuse pop irlandaise, qui finirait par faire les beaux jours de Dag & Red. Cette saison-là, après une série de 21 victoires d’affilée en championnat, le club passa de la 16e à la 2e place, n’échouant qu’à 4 points du champion Notts County. Mais la 2e place permit de jouer un barrage contre les écossais de Saint Mirren Football Club, qui cédèrent sur la double confrontation par un double 3-0 et 0-3 favorable à Dag & Red. Et Verpakovskis avait marqué 5 des 6 buts, pour l’accession en 3e division britannique !

Un jeune latéral commençait sérieusement et également à faire parler de lui, très propre dans l’exécution du jeu, et particulièrement tranchant dans ses passes ; c’est Pavel Morogon, formé au club, et qui participera de longues années au succès des Londoniens.





Pour la troisième saison de Stevenborg et Merzig, le duo luxembourgeois fit venir le gardien international irlandais JJ Armstrong, dit « Step », pour un beau paquet d’argent qu’Infantino avait dégoté en signant un contrat exclusif pour la 3e division avec l’équipementier Puma. Le joueur fut convaincu par le parcours en Coupe du Roi de Dag & Red, qui la saison précédente en 8e de finale avait quand même sorti les stars du Glasgow Rangers FC aux tirs aux buts, 26 à 24 ! C’est aussi l’arrivée de l’ivoirien Bamako, dit « Bamba », qui fera lui aussi plus tard une grande carrière internationale. Si le parcours en Coupe fut cette fois modeste, l’équipe montra une extraordinaire efficacité en championnat terminant avec 15 points d’avance sur Chelsea FC, le rival londonien.

Verpakovskis était meilleur buteur, et c’est Vesper Hope qui était son dauphin. Mike Lovell, dit « Polo », le nouveau capitaine de l’équipe, avait joué tous les 38 matchs de championnat. Verpakovskis, Hope et Lovell furent grandement sollicités, y compris par Manchester United disait-on, mais aucun ne quitta le club. Man Utd finit par acheter Michael Pennmawr, 25 ans, pour 19 Millions de crédits-dollars, mais Michael n’avait pas fait ses adieux…

Pour la quatrième saison, Dag & Red évoluerait pour la première fois dans l’antichambre de le l’élite. Infantino et Stevenborg étaient décidés à se faire aider par un Directeur Sportif. Et Ole Gunnar Solskjaer, qui envisageait d’abord de raccrocher, fut d’accord pour prendre le train de la dynamique qui se lançait pas loin de Thames View. Il apporta avec lui Jeff Salibur, un vétéran international britannique membre de la première équipe unifiée, qui avait fait les beaux jours de Liverpool FC. Et la solidité défensive qu’il mit en œuvre au travers du duo constitué avec Morogon s’avèrerait décisive.

Le stade de Dag & Red était passé à une capacité de 28000 places. Il y avait désormais 25000 abonnés, et on ne pouvait guère faire mieux le long de Victoria Road. Infantino et Solskjaer commençait à réfléchir à de nouveaux plans ; à moins que les Daggers aillent jouer dans la Cité de Londres…




En tout cas, cette saison-là, ils verraient Wembley. Le capitaine Lovell conduirait l’équipe devant le Roi William, et Jean-Baptiste Braun, le nouvel ailier luxembourgeois offrirait le but vainqueur face à Arsenal.

Stevenborg et Merzig jubilaient dans l’antre de Wembley. Certes, on sacrifiait la fin de saison, et Dag & Red ne finirait que 3e, mais cette victoire signifiait beaucoup. Y compris une qualification en Coupe des Coupes.

Pour la cinquième saison qui se disputeraient toujours en 2e division britannique, Infantino avait annoncé qu’il se retirerait si le club passait la barre de l’accession. Solskjaer semblait tout désigné pour reprendre le D&R, sachant que le sponsor principal, Blue Origin, était prêt à la suivre.

L’expérimenté norvégien avait surtout œuvré pour faire venir Wansa Sindrons, un très grand milieu défensif norvégien, roi de l’anticipation et de la frappe dans son club de Mourmansk. Pennmawr était de retour, arraché en prêt à Manchester, alors que Vesper Hope, revenait lui aussi aux bercailles après un passage éclair à l’Ajax d’Amsterdam. L’occasion d’ailleurs pour Dag & Red de s’associer à « l’Alliance Hanséatique » qui était tout simplement devenue la deuxième puissance lobbyiste des clubs mondiaux.

Et Dag & Red fut champion. Le titre fut célébré dans une liesse totale d’un stade archi-comble suite à une victoire 7-0 contre les malheureux joueurs de Bolton. Verpakovskis terminait encore meilleur buteur, ce qui le verrait finalement transféré à Kaliningrad-Königsberg, encore une fois croisée sur la route de Stevenborg et Merzig. L’occasion d’évoquer le beau parcours en Coupe des Coupes européenne désormais nommée « Sega », du nom du sponsor principal. Dag & Red élimina successivement Bakou, le Hrvatska Zagreb, puis Apoel Nicosie. En Huitième de finale, le voyage de Séville fut plus difficile. Après une défaite 2-4 sur place, Hope et Braun réalisèrent pourtant l’exploit de marquer chacun un doublé. Salibur et Morogon derrière avaient tenu, sauf contre le coup de tête de l’attaquant « Toro Junior ». Ce 4-1 fut retenu comme l’exploit de la saison en Grande-Bretagne unifiée. En quart de finale, le même scénario arriva contre Kaliningrad-Königsberg ! C’est le quadruplé de Verpakovskis qui convainquit les russes de le recruter. En demi-finale, en revanche, le Galatasaray stoppa nette la progression des Daggers.

Mais avec la manne financière désormais à disposition, Solskjaer pourrait monter sereinement en première division britannique, et Infantino de se retirer tranquillement. Stevenborg s’engageait à faire encore une saison pour vivre « le Graal », et Merzig le suivrait. C’est l’arrivée de la légende Gemili « Captain » Cricket qui fut réellement sensationnelle cette année-là. Glasgow avait lâchement échoué en Ligue Mondiale des Champions Adidas, et Cricket s’était épuisé. Le nouveau challenge de Dag & Red arrivait à point nommé, sachant que la saison de première division se jouerait tout simplement dans le stade de Wembley pour accueillir correctement les 58000 fans désormais suiveurs du club.

On ne se souvient plus à quelle place finirait le Dagenham & Redbridge Football Club, mais un cycle se terminait. En fin de saison, Stevenborg et son fidèle Merzig irait voir en Allemagne si l’herbe y était plus verte, laissant sans doute de nouvelles stars émerger chez les Daggers…

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